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PPCR: Vous avez dit « revalorisation ? »

Le 16 octobre, FO Fonction publique et l’ensemble des fédérations syndicales de fonctionnaires étaient reçues par le Ministre Gérald Darmanin, pour un rendez-vous salarial reporté par la grève et la mobilisation réussies des fonctionnaires et agents publics du 10 octobre.

La mise en oeuvre des éléments programmées en 2018 de PPCR est repoussée d’une année au 1er janvier 2019. Comme le craignait FO qui avait refusé de signer PPCR, les engagements du précédent gouvernement étaient forcément fragiles et ne garantissaient en rien les maigres compensations du protocole: les faits nous donnent raison.
Cependant, toutes les mesures négatives de PPCR se poursuivent (allongement des carrières, suppressions des réductions de temps de service, nouvelle évaluation des enseignants, avancement au mérite…) et les revalorisations, même très faibles, sont reportées. De surcroit, la baisse du pouvoir d’achat des fonctionnaires sera accentuée par l’augmentation des retenues pour pension.

Lire le communiqué FO (fonction publique)

D’ailleurs, comme l’indique la résolution du bureau national du SNUDI-FO, « dans le cadre de PPCR, le ministère entend remettre en cause les barèmes. D’ores et déjà, ils pourraient ne plus être utilisés pour les accélérations de carrière aux 6ème et 8ème échelons de la classe normale dès cette année alors que les rendez-vous de carrière n’ont pas encore eu lieu. »

A propos de ces accélérations de carrière, nous disons:
Non à l’arbitraire ;
Abandon de l’évaluation ;
Rétablissement d’un barème chiffré basé essentiellement sur l’AGS.

Les signataires de PPCR (UNSA, SNUipp-FSU) s’échinent à présenter le protocole comme une avancée notoire du point de vue de la revalorisation indiciaire et à de l’augmentation du nombre de points d’indice par échelon. Cependant la méthode Coué ne parviendra pas à duper les personnels: ceux-ci savent lire le bas de leur fiche de paye !

Depuis bientôt 3 ans le SNUDI-FO 53 vous alerte sur les conséquences de PPCR sur notre métier, et plus largement sur toute la fonction publique. Aujourd’hui les organisations syndicales signataires de PPCR admettent que le compte n’y est pas, seulement il est trop tard ! Aujourd’hui seul FO demande clairement le retrait de PPCR.

Pour y voir plus clair, le SNUDI-FO a édité un document de 8 pages, complet sur PPCR. Nous l’envoyons aux adhérents et le déposons lors de nos visites d’école. Demandez le aux militants du SNUDI-FO.

Décryptage

La soi-disant« revalorisation» PPCR s’étale jusqu’en 2019 et s’effondre en 2020.

L’augmentation du traitement des PE porte sur le traitement brut et non sur le traitement net. Ainsi l’augmentation du taux de cotisation pension civile a entraîné une diminution du traitement net des personnels depuis 2010 que ni la revalorisation du point d’indice de 1,2% en 2016/2017, ni la revalorisation indiciaire ne suffisent et suffiront à compenser !

Les revalorisations indiciaires proviennent en grande partie du transfert d’une partie de l’ISAE en point d’indice. C’est au total, environ 506 € brut annuel qui proviendront de l’ISAE (4 points d’indice en 2017 et 5 en 2018), l’indemnité ISAE sera réduite d’autant. En 2018, c’est cette transformation qui, à elle seule, induira une revalorisation qui reste dérisoire.

Dans la plupart des cas, à échelon identique, le niveau des salaires nets sera donc inférieur à celui de 2010 et ceci sans compter l’augmentation de 1, 7% de la CSG en janvier 2018 dont le gouvernement n’a annoncé aucune mesure compensatoire.

Les stagiaires et les nouveaux titulaires payent le prix fort en étant bien moins rémunérés qu’en 2010.

PPCR est donc un outil pour le ministère pour réaliser des économies sur le dos des personnels qui lui permettront de financer quelques améliorations, pour quelques-uns, très rares, qui accéderont, à « la tête du client», à la classe exceptionnelle.

PPCR : un même rythme pour tous ?

C’est en partie vrai, mais il faut relativiser et regarder les choses dans le détail. Dans l’ancien système, pour accéder au 11ème échelon de la classe normale, les écarts  entre collègues pouvaient théoriquement aller de 20 ans pour un avancement uniquement au grand choix à 30 ans pour un avancement uniquement à l’ancienneté. Dans la réalité, cela n’existait pas et les écarts étaient beaucoup plus réduits.

Dans le nouveau système, l’écart sera de 24 à 26 ans en classe normale. C’est effectivement plus homogène. Il y aura 4 groupes de collègues : ceux qui ne gagneront pas de réduction d’ancienneté parce que leurs évaluations n’auront pas été suffisantes, ceux qui gagneront un an pour le passage au 7ème échelon, ceux qui gagneront un an pour le passage au 9ème échelon, ceux qui gagneront 2 ans. Mais la durée moyenne sera équivalente.

Le SNUDI FO a toujours revendiqué un rythme unique, le plus rapide pour tous ! On est loin du compte.

Rappelons que dans l’ancien système pour chaque passage d’échelon, 30% des collègues étaient promus au grand choix, 50% au choix et 20% à l’ancienneté : le corps est donc globalement perdant.

Exemple d’une collègue promue au 7ème échelon au 01.03.2016 : Quel sera l’impact de son reclassement sur son déroulé de carrière?

Avec la nouvelle grille PPCR

7ème échelon au 1.09.2017 ancienneté 1an et 6 mois conservée 8ème échelon au 1.03.2019

Avec l’ancienne grille à trois cadences

Grand choix 8ème échelon au 1.09.2018 perte de 6 mois de traitement au 8ème échelon

=

1 012,18 euros brut annuel

30% promouvables
Choix 8ème échelon au

1.03.2019

ni perte, ni gain de traitement environ 50% des promouvables
Ancienneté 8ème échelon au 1.09.2019 perte de 6 mois de traitement au 8ème échelon

=

1 012,18euros brut annuel

environ 20% des promouvables

Et c’est ainsi pour quasiment tous les échelons. Le reclassement PPCR ne changera rien pour 50% des personnels, bénéficiera à 20% et sera défavorable pour 30% des collègues. Le solde est donc négatif et les enseignants sont globalement perdants.

*En application de PPCR au 01.09.2017, tous les enseignants sont reclassés dans la nouvelle grille indiciaire, qui à la classe normale, ne comprend plus qu’une cadence, sauf au 6ème et au 8ème échelon où une possibilité d’accélération de carrière d’un an pour atteindre l’échelon suivant est prévue pour 30 % des promouvables justifiant d’une évaluation « excellente ».

Et le reclassement des PE Hors Classe ?

Les PE Hors Classe sont reclassés automatiquement dans l’échelon inférieur en gardant leur ancienneté dans l’échelon.

On pourra apprécier le tour de passe-passe du ministère dont l’affichage pourrait laisser entendre qu’un PE Hors Classe gagnera beaucoup plus, dès septembre 2017, ce qui serait le cas à échelon égal. Or la rétrogradation d’échelon ne lui apportera que quelques points d’indice supplémentaires.

Les PE promus intégreront l’échelon de la hors classe dont l’indice est égal ou immédiatement supérieur à celui détenu dans la classe normale.

A ceci s’ajoute le hold-up sur la Hors Classe et la nouvelle Evaluation des enseignants.

Oui, mais l’avancement est désormais déconnecté de l’évaluation !

Absolument pas !

Si sur les 5 premiers échelons, tout le monde avance au même rythme (mais il est allongé : 8 ans 6 mois au lieu de 6 ans 6 mois à 8 ans), à partir du 6ème échelon, le rythme est calculé sur le choix du précédent système, mais avec deux possibilités pour une minorité de collègues de gagner 1 an. Du 6ème au 9ème échelon, il faudra désormais 7 ans 6 mois à 9 ans 6 mois, contre 7 ans 6 mois à 11 ans 6 mois précédemment.

A partir du 9ème échelon, et de l’accès à la hors classe, les choses ne sont pas arrêtées, et c’est là que des écarts pourraient potentiellement se creuser, entre des collègues qui accèderaient relativement tôt à la hors classe et les autres. Pour l’instant, nous ne savons pas précisément quels seront les critères d’accès à la hors classe. Ce que nous savons, c’est qu’il y a un entretien de carrière et une évaluation prévue pour cela, au bout de deux ans dans le 9ème échelon. La question qui se pose est : quelle sera la part de l’évaluation par rapport à l’ancienneté ? C’est d’autant plus déterminant, que cet entretien de carrière est le dernier, et ne peut donc être « rattrapé » en cas d’évaluation négative ou seulement moyenne.

Oui, mais tout le monde accède à la hors classe !

On a tenté de nous le faire croire, mais le précédent gouvernement lui-même (qui a donc mené la négociation) s’est chargé de le démentir. PPCR en prévoit « la possibilité », mais ne le garantit en aucun cas. Les conditions actuelles garantissent mêmes exactement l’inverse.

Et la revalorisation indiciaire ?

Certes, les grilles ont été remaniées, avec des indices plus élevés, sur un calendrier étalé au moment de la négociation jusqu’en 2020. Le problème, c’est que d’une part cette revalorisation ne suffit pas, loin s’en faut, à compenser les pertes de pouvoirs d’achat depuis 2010 (gel du point d’indice et augmentation chaque année, jusqu’en 2020 de la retenue pour pension civile), tout en intégrant le transfert de l’ISAE dans le traitement indiciaire. D’autre part, elle n’engageait que le gouvernement précédent, qui n’a offert aucune garantie tant sur le calendrier que sur la revalorisation. L’actuel gouvernement envisage d’ores et déjà de ne pas mettre en œuvre ce calendrier, annonce le gel du point d’indice (rappelons que dans PPCR, la revalorisation de la valeur du point d’indice est conditionnée aux indicateurs macro-économiques, c’est-à-dire pour faire court aux exigences de réduction de la dette). Bref, on est loin du compte et pour nombre d’échelons, le traitement net en 2020 sera inférieur au traitement net en 2010.

Oui, mais l’évaluation est plus formative et moins infantilisante !

Trois entretiens de carrière, précédés chacun d’une inspection, donneront lieu à des compte-rendu d’évaluation dont dépendront les réductions d’ancienneté pour 30% des collègues pour le passage au 7ème échelon, au 9ème échelon, et l’accès à la hors classe (suivant des modalités qui ne sont pas encore précisément définies).

La note est supprimée et remplacée par une appréciation (« à consolider, satisfaisant, très satisfaisant, excellent »). Moins « infantilisant », qu’ils disaient !

L’évaluation ne porte plus seulement sur ce qui est observable en classe, mais également sur des questions beaucoup plus larges et échappant assez largement à la maîtrise des collègues, notamment la compétence « Contribuer à l’action de la communauté éducative et coopérer avec les partenaires de l’école », ou « coopérer avec les parents d’élèves ».

Un accompagnement peut être mis en place, en théorie à la demande de l’enseignant, ou à l’initiative de l’institution. Dans le premier cas, cela supposerait un abondement des moyens de formation continue considérable. Dans l’autre cas, on imagine la galère que deviendrait la vie d’un collègue qui ne consentirait pas à l’accompagnement « proposé ».

Enfin, la dernière évaluation sera définitive, et non susceptible d’être « rattrapée ». Comme l’accès à la hors classe en dépendra largement, elle donnera certainement lieu à de nombreuses contestations. Mais comment contester une grille avec des croix ? Ce n’était déjà pas simple avec un rapport littéral détaillé, argumenté…

Bref, pour le SNUDI FO, cette nouvelle évaluation ne sera en aucun cas moins « infantilisante », mais sera au contraire plus subjective et arbitraire, renforcera la territorialisation de l’école, imposera des accompagnements non consentis à des collègues, dans un cadre où les moyens de la formation continue demeurent dérisoires.

Pour FO, l’exigence demeure : abrogation de PPCR !

Notre tableau de reclassement

Les informations administratives au 01/09/2017 (traitement, avancement…)