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FO refuse les consignes du ministre sur le harcèlement !
Assez des tâches supplémentaires imposées aux personnels !
Arrêt des suppressions de postes ! Création des postes nécessaires !

Le ministère Attal a envoyé dans toutes les écoles et établissements, en plein congés scolaires, ses consignes concernant la « lutte contre le harcèlement : programme Phare et passation des questionnaires élèves ».

Cela fait suite à des groupes de travail organisés par le ministère, que la FNEC-FP FO a quitté (seule ?) le 4 octobre dernier (lire à ce sujet), et à un Conseil Supérieur de l’Education (CSE) organisé en urgence le 19 octobre pour étudier un Projet de décret relatif à la mise en oeuvre d’un traitement de données à caractère personnel dénommé « Enquête harcèlement », texte contre lequel FO a voté.

Ainsi, les directeurs d’école ont reçu le 23 octobre, pendant les congés, un message du ministère relatif à la « lutte contre le harcèlement ». Ils apprennent notamment que «tous les élèves des écoles à compter du CE2, des collèges et des lycées se verront proposer de remplir une grille d’auto-évaluation non nominative visant à évaluer s’ils sont susceptibles d’être victimes de harcèlement scolaire. Deux heures du temps scolaire seront banalisées à cette fin, entre le jeudi 9 novembre et le mercredi 15 novembre. »

Ainsi, dans le 1er degré, tous les enseignants ayant en charge une classe du CE2 au CM2 sont sommés de consacrer deux heures à la mise en place de cette grille d’auto-évaluation : pas moins de 33 questions visant à savoir si les élèves ont déjà eu peur à l’école, ont été mis à l’écart à la récréation, sont empêchés de déjeuner tranquillement, se sont déjà bagarrés, s’ils ont mal au ventre ou à la tête, s’ils se sont déjà mis en colère, s’ils connaissent le numéro de téléphone contre le harcèlement…

Les enseignants désormais comptables de « la lutte contre le harcèlement »…

On peut lire dans le guide de passation de la grille d’autoévaluation sur le harcèlement scolaire : « Le professeur en charge de la classe ou le professeur principal examine les questionnaires des élèves de sa classe et procède aux décomptes des réponses pour chaque questionnaire (nombre de réponses 1, 2, 3 ou 4). Il procède à une première analyse, qu’il partage ensuite avec le directeur de l’école ou le chef d’établissement. »

« Quel que soit le niveau retenu (classe, niveau d’enseignement, école, collège ou lycée), l’exploitation des réponses des élèves permet d’évaluer et d’objectiver l’existence d’un phénomène de harcèlement afin de permettre une prise de conscience et une mobilisation collective. »

« Selon des modalités à l’initiative de chaque établissement et école (ateliers des parents, réunion par classe ou par niveau, etc.), une restitution à l’attention des élèves et de leurs parents d’élèves est organisée. »

Les personnels, dont les conditions de travail s’aggravent d’année en année, seraient donc désormais comptables, après analyse des grilles, de repérer les situations de harcèlement, d’informer les parents d’élèves et de déterminer des procédures de prévention, détection et traitement de faits de harcèlement.

… sous la responsabilité du directeur d’école !

Un projet de décret (contre lequel FO a voté), qui vise à mettre en oeuvre chaque année le passage de ces grilles d’auto -évaluation, stipule dans son article 1 : « Renseignées en classe par les élèves sous l’autorité d’un enseignant, ces grilles sont examinées par un professeur, sous la responsabilité du directeur d’école. »

Le directeur serait désormais « responsable » de l’examen de ces grilles d’auto-évaluation… et donc de l’identification de situations de « harcèlement » au sein de l’école !

Ce même projet de décret indique d’ailleurs dans son article 5 : « Peuvent accéder aux réponses à la grille d’autoévaluation : Dans le premier degré, l’inspecteur de l’éducation nationale de la circonscription, le directeur d’école, l’enseignant chargé de la classe de l’élève, l’équipe ressource harcèlement et les personnes spécialement désignées à cet effet par le directeur d’école » : Le directeur se verrait donc également chargé de « désigner » des « personnes » susceptibles d’accéder aux grilles d’auto-évaluation !

De la même manière, selon ce projet de décret, en référence à l’article L543-1 du code de l’éducation, le directeur devrait, sur la base du traitement des réponses aux questionnaires, élaborer « des lignes directrices et des procédures du projet d’école destinées à la prévention, à la détection et au traitement des faits constitutifs de harcèlement scolaire », auxquelles il devrait associer « la communauté éducative », « les personnels médicaux, les infirmiers, les assistants de service social et les psychologues de l’éducation nationale intervenant au sein de l’école ».

Le ministre entend désormais rendre le dispositif « Phare » obligatoire !

N’est-ce pas à mettre en lien avec le message du ministère aux écoles, qui précise que le programme « Phare », programme de lutte contre le harcèlement à l’école, serait désormais obligatoire, avec notamment la mise en place partout, d’« ambassadeurs » contre le harcèlement et d’équipes spécialement formées à la gestion de ces situations ?

Les pressions pour trouver des volontaires pour être référents « Phare » vont donc se multiplier !

Les personnels en ont assez des tâches supplémentaires qu’on leur impose, des missions qui ne relèvent ni de leurs obligations de service ni de leur statut, de la remise en cause de leur liberté pédagogique !

Les directeurs ne veulent pas des responsabilités supplémentaires dont le ministère les accable en application de la délégation de compétences de l’autorité académique prévue par la loi Rilhac !

Ce qui a été abandonné, notamment suite aux interventions FO :

Il n’est plus question d’un questionnaire nominatif à utiliser en cas de suspicion de harcèlement.

L’obligation d’organiser à l’issue de la journée de sensibilisation au harcèlement une restitution aux parents, sur la base des renseignements récoltés dans les questionnaires, a été abandonnée.

Ce qui demeure :

Une grande journée de sensibilisation au harcèlement devra être organisée entre le 9 novembre et le 15 novembre dans toutes les classes (lycées, collèges et écoles à partir du CE2). Deux heures doivent y être consacrées (par l’enseignant à l’école, dans le cadre d’une journée banalisée au collège et lycée en mobilisant les professeurs principaux). Des « kits pédagogiques » sont proposés sur Eduscol pour organiser ces séances.

Pendant ces deux heures, une grille d’auto-évaluation anonymée doit être distribuée et remplie par les élèves…

Ces grilles sont examinées par un professeur, sous la responsabilité du directeur ou du chef d’établissement et en lien avec les inspecteurs et les « équipes ressources harcèlement » en vue de l’adoption des « mesures appropriés visant à lutter contre le harcèlement »…

Les réponses aux grilles d’auto-évaluation doivent être communiquées aux inspecteurs, à l’académie, au ministère, aux organismes de recherche ayant conclu une convention avec le ministère…

Ces consignes ont un caractère permanent puisque le décret contre lequel FO a voté au CSE prévoit que ces mesures s’appliquent chaque année.

Ce qui est ajouté :

L’adhésion au programme Phare serait désormais obligatoire pour toutes les écoles et pour tous les établissements scolaires. (Ce qui démontre une fois de plus le bien fondé de nos analyses, en dépit des mensonges de notre administration : Phare n’a jamais été obligatoire – lire à ce sujet)

Ainsi, le ministre donne pour consigne de placer les personnels en première ligne, c’est-à-dire les rendre responsables de la mise en œuvre de son slogan 100% prévention, 100 % détection, 100 % solution.

Mais de son côté, la « lutte contre le harcèlement » se traduit pour lui par 2 500 postes supprimés à la rentrée, à grand coup de 49-3, qui s’ajoutent aux 2 000 postes supprimés en 2023 et plus de 11000 postes supprimés depuis 2017 !

Inacceptable pour le SNUDI-FO 53 !

Inacceptable que les personnels poussés au bout de leurs limites par des conditions de travail dégradées soient encore désignés comme responsables et boucs émissaires.

Inacceptable de mettre les personnels en difficulté avec ces nouvelles exigences : organiser une séance de deux heures sur un sujet délicat et potentiellement anxiogène pour certains élèves, distribuer les « grilles d’auto-évaluation » qu’il faudra dépouiller et analyser, dont il faudra saisir et transmettre les résultats à la hiérarchie et aux organismes de recherche, pour lesquelles il faudra déterminer les « mesures visant à lutter contre le harcèlement »…

Autant d’activités chronophages qui engagent la responsabilité des personnels, engagement d’autant plus absurde que ces grilles d’auto-évaluation sont anonymes…

Inacceptable de prétendre rendre l’adhésion au programme Phare obligatoire.

Le SNUDI-FO 53 rappelle que cela ne relève en aucun cas des obligations de service des professeurs, ni des missions statutaires de chacun des personnels. Le syndicat s’opposera à toutes pressions de la hiérarchie pour désigner des « volontaires », ou des « référents bien-être »

Ça suffit !

Ce dont les élèves et les personnels ont besoin, ce ne sont pas de plateformes téléphoniques, de « coachs », de cours d’empathie, de programmes Phare, de grilles d’auto-évaluation…

Ce sont des milliers de postes d’infirmières, de médecins scolaires, d’assistantes sociales, d’enseignants, d’enseignants spécialisés, de RASED complets, de PsyEN, d’AESH avec des statuts et de vrais salaires… qui sont nécessaires !

Le SNUDI-FO 53 réaffirme ses revendications
– Respect de la liberté pédagogique et des contenus disciplinaires : aucune « séance » au contenu à télécharger en ligne ne peut être imposée ;
– Abandon des dispositifs chronophages qui visent à engager la responsabilité des personnels (distribution de la grille d’auto-évaluation, analyse et remontée des données, élaboration des « mesures visant à lutter contre le harcèlement »…) ;
– Abandon du programme Phare.

Respect des obligations réglementaires de service et des statuts ;
– Et en premier lieu, annulation des suppressions de postes et création de tous postes statutaires nécessaires !

Le SNUDI-FO 53 invite les personnels à se réunir dès la rentrée, à participer aux RIS et stages FO, à s’organiser collectivement pour refuser ces consignes, à établir leurs revendications et en particulier les besoins en postes pour assurer des conditions de travail acceptables pour les personnels à même de garantir le droit à l’instruction et au bien-être de tous les élèves.

La FNEC FP-FO nationale s’adresse aux autres organisations syndicales pour refuser en commun ces mesures et donner une consigne syndicale aux personnels.